Illusion céleste s’est imposé comme l’un des anime les plus marquants de 2023, au point d’être souvent présenté comme un incontournable pour tout fan de séries animées post apocalyptiques. Adaptation du manga de Masakazu Ishiguro, l’anime a rapidement séduit par son atmosphère étrange, ses personnages complexes et sa narration en deux temps, entre paradis artificiel et enfer à ciel ouvert.
Mais un détail a particulièrement retenu l’attention des fans : le réalisateur Hirotaka Mori a révélé que The Last of Us, le jeu culte de Naughty Dog, a été une inspiration majeure pour l’univers visuel et l’ambiance de la série Illusion céleste. Lors d’un panel à la convention Anime Central, il a expliqué avoir puisé dans l’artbook du jeu pour façonner le monde en ruines parcouru par Maru et Kiruko.
Dans cet article, nous allons revenir sur ce qui fait la singularité d’Illusion céleste, sur la manière dont The Last of Us a influencé l’anime, et sur ce que cette filiation raconte de l’évolution des récits post apocalyptiques entre jeu vidéo et animation japonaise.
Table des matières
Illusion céleste, un anime post apocalyptique déjà culte
Un manga singulier signé Masakazu Ishiguro
À l’origine d’Illusion céleste, on trouve le manga Tengoku Daimakyo de Masakazu Ishiguro, publié au Japon depuis 2018. L’auteur y développe un univers complexe, mêlant road movie, science fiction, mystère, horreur et réflexion sur l’enfance et l’identité.
Le récit repose sur une structure en miroir qui alterne entre deux espaces et deux tonalités :
- un lieu clos, présenté comme une sorte de paradis pour enfants,
- un Japon extérieur ravagé, où la civilisation s’est effondrée.
Cette construction donne à Illusion céleste une ambiance très particulière, entre douceur trompeuse et menace permanente.
Une adaptation animée par le studio Production I.G
En 2023, le studio Production I.G adapte le manga en série animée, sous le titre international Heavenly Delusion, que de nombreux fans francophones appellent Illusion céleste. L’anime compte 13 épisodes, réalisés par Hirotaka Mori, et couvre les premiers volumes du manga.
La série s’est rapidement imposée comme l’une des meilleures productions animées de l’année. Elle a été saluée pour :
- la qualité de son animation,
- la richesse de sa mise en scène,
- la gestion subtile de ses deux lignes temporelles,
- la profondeur de ses personnages, notamment Maru et Kiruko.
Illusion céleste a aussi remporté plusieurs récompenses et nominations, confirmant son statut d’anime majeur de 2023, notamment dans des catégories comme meilleure série, meilleure direction ou meilleurs décors.
Un univers entre paradis et enfer
Le faux paradis derrière les murs
La première facette d’Illusion céleste se déroule dans un établissement fermé, presque clinique, où des enfants sont élevés par des adultes et des robots dans un environnement propre et contrôlé. Tout y semble calme, protégé, presque utopique.
Les enfants y suivent une routine réglée, jouent, apprennent, discutent de leur avenir. Pourtant, certains détails perturbent cette image de perfection :
- des questions interdites sur le monde extérieur,
- des visions, des prédictions,
- un sentiment diffus que quelque chose cloche.
C’est ce contraste entre innocence enfantine et mystère latent qui donne au « paradis » d’Illusion céleste une force particulière.
Un Japon ravagé à ciel ouvert
En parallèle, Illusion céleste montre un monde extérieur totalement ravagé. Quinze ans après une catastrophe, le Japon n’est plus qu’une succession de ruines envahies par la végétation, de villages abandonnés et de routes défoncées. Des créatures monstrueuses, les « Man-Eaters », rôdent et menacent les survivants.
C’est dans ce décor que l’on suit Maru et Kiruko, un duo atypique qui sillonne l’ancien Tokyo à la recherche d’un endroit mystérieux que l’on appelle le « paradis ». Leur voyage est fait de rencontres, de dangers, mais aussi de moments de tendresse et de questionnements sur ce qui fait encore sens dans un monde brisé.
Cette double structure, entre jardin clos et enfer extérieur, rapproche déjà Illusion céleste d’autres récits dystopiques, mais c’est surtout son traitement de la route, des ruines et du lien entre ses deux héros qui fait écho à The Last of Us.
The Last of Us, une influence assumée par Hirotaka Mori
Un réalisateur profondément marqué par le jeu
The Last of Us, développé par Naughty Dog, est l’une des œuvres vidéoludiques les plus marquantes des dix dernières années. Ce jeu post apocalyptique suit le périple de Joel et Ellie à travers des États Unis dévastés, où la nature a repris ses droits, et où chaque rencontre peut être synonyme de drame.
Hirotaka Mori a expliqué être un grand fan du jeu. L’ambiance visuelle, le sens du détail dans les décors et la manière dont The Last of Us raconte la relation entre ses deux protagonistes à travers le voyage ont profondément influencé sa propre vision de l’univers d’Illusion céleste.
Lors de la préparation de l’anime, le réalisateur a emporté avec lui l’artbook de The Last of Us au studio. Il s’en est servi comme référence pour guider la direction artistique, en particulier pour les environnements extérieurs.
Une direction artistique nourrie par l’artbook de The Last of Us
Ce n’est pas seulement le concept général du monde post apocalyptique qui a inspiré Illusion céleste, mais bien la façon concrète de le mettre en scène :
- bâtiments effondrés envahis par la végétation,
- intérieurs abandonnés où le temps semble figé,
- lumière naturelle travaillée pour renforcer l’impression de solitude,
- routes défoncées, panneaux rouillés, restes de la société d’avant.
Dans Illusion céleste, comme dans The Last of Us, les ruines ne sont pas de simples décors. Elles racontent une histoire, celle d’un monde disparu, et servent de miroir aux émotions des personnages. Cette approche est typique des œuvres où le décor est presque un personnage à part entière.
Les parallèles entre Illusion céleste et The Last of Us
Un duo au centre de tout
Élément le plus évident : le cœur d’Illusion céleste repose sur la relation entre deux protagonistes qui traversent ensemble un monde dévasté. Maru et Kiruko, comme Joel et Ellie, forment un duo qui évolue au fil du voyage.
On retrouve plusieurs points de convergence :
- une dynamique protecteur/protégé, même si elle est plus ambiguë et complexe dans Illusion céleste,
- des dialogues qui alternent entre légèreté, tension et confidences,
- une relation qui se construit autant dans les silences que dans les grandes scènes dramatiques.
Ce n’est pas une copie, loin de là. Illusion céleste prend ses propres directions, notamment avec le passé de Kiruko, la question de l’identité de Maru et les liens mystérieux avec les enfants du « paradis ». Mais on sent clairement que la structure du « duo en voyage dans un monde ruiné » reprend la force de The Last of Us pour la transposer dans un imaginaire très japonais.
La route vers un paradis incertain
Autre rapprochement, le but du voyage. Dans The Last of Us, Joel et Ellie se dirigent vers un groupe de survivants qui pourrait détenir la clé d’un vaccin. Dans Illusion céleste, Maru et Kiruko cherchent le « paradis », un lieu dont ils ne savent presque rien, mais qui cristallise tous les espoirs.
Dans les deux cas, l’objectif n’est pas seulement un prétexte à l’aventure. Il incarne une forme de promesse, un idéal, et pose une question centrale : que reste-t-il de l’espoir quand le monde s’est effondré ?
Une ambiance lente, immersive et chargée de tension
The Last of Us est connu pour son rythme posé, ses longues séquences d’exploration, ses temps morts qui laissent place à la contemplation et au malaise. Illusion céleste adopte une approche similaire :
- plans larges sur des paysages urbains désertés,
- longues marches ponctuées de discussions philosophiques ou banales,
- explosions de violence soudaines, d’autant plus marquantes qu’elles surgissent après des moments presque paisibles.
Ce choix de mise en scène renforce la proximité entre les deux œuvres, tout en laissant à Illusion céleste la place pour ses propres obsessions, notamment autour de la question de l’enfance, de l’identité et du genre.
Pourquoi cette inspiration fonctionne si bien dans Illusion céleste
Des décors qui racontent autant que les personnages
Si l’influence de The Last of Us est assumée, elle ne réduit pas Illusion céleste à un simple hommage. Au contraire, elle enrichit l’anime en donnant une profondeur supplémentaire à ses environnements. Le spectateur comprend très vite que chaque ruine, chaque bâtiment, chaque route abandonnée porte les traces d’un passé que la série ne montre pas frontalement.
Ce refus de tout expliquer, couplé à une direction artistique très travaillée, crée un sentiment de mystère constant. On sent que le monde d’Illusion céleste a une histoire, mais celle-ci est fragmentée, cachée entre les lignes, comme dans les meilleurs récits post apocalyptiques.
Des personnages au cœur du récit
L’autre force d’Illusion céleste, comme The Last of Us, réside dans sa capacité à recentrer l’histoire sur ses personnages. Les scènes les plus marquantes ne sont pas forcément celles où les monstres attaquent, mais celles où Maru et Kiruko discutent, doutent, se disputent ou se confient.
La série aborde en creux des thèmes comme :
- la construction de soi dans un monde brisé,
- la question du corps et de l’identité,
- la culpabilité, le trauma et la résilience,
- le poids des souvenirs et des promesses.
En cela, Illusion céleste ne se contente pas de reprendre la grammaire visuelle de The Last of Us. Elle s’en sert comme d’un socle pour explorer ses propres thèmes, profondément ancrés dans la sensibilité de Masakazu Ishiguro et dans la tradition de l’animation japonaise.
Vers une saison 2 d’Illusion céleste ?
Un manga encore en cours
Le manga Illusion céleste est toujours en cours de publication, ce qui explique pourquoi l’anime s’arrête à un moment charnière de l’histoire. La première saison adapte une partie des volumes disponibles, tout en ménageant suffisamment de marge pour une suite.
Tant que Masakazu Ishiguro n’aura pas avancé suffisamment dans son récit, une saison 2 complète restera délicate à produire. Mais au vu du succès critique et public de la première saison, il serait surprenant que la série en reste là.
Ce que les fans peuvent espérer
Si une saison 2 voit le jour, elle pourrait approfondir plusieurs éléments laissés en suspens :
- le lien précis entre Maru et les enfants du paradis,
- la véritable nature de la catastrophe qui a ravagé le monde,
- le rôle exact des créatures monstrueuses,
- le destin de Kiruko et la façon dont son passé continue de la hanter.
Dans tous les cas, on peut s’attendre à ce que la série continue de jouer sur ce mélange unique de tension, de mystère et d’émotion, avec une direction artistique toujours marquée par cette inspiration venue de The Last of Us, mais désormais pleinement intégrée à l’identité d’Illusion céleste.
Conclusion : Illusion céleste, un pont entre anime et jeu vidéo
Illusion céleste n’est pas simplement « un anime inspiré par The Last of Us ». C’est une œuvre à part entière, qui s’inscrit dans la lignée des grands récits post apocalyptiques tout en apportant une sensibilité proprement japonaise et une réflexion profonde sur l’enfance, l’identité et l’espoir.
Le fait que son réalisateur, Hirotaka Mori, revendique ouvertement l’influence du jeu de Naughty Dog montre à quel point les frontières entre médias se sont estompées. Aujourd’hui, un anime comme Illusion céleste peut dialoguer avec un jeu vidéo comme The Last of Us, emprunter certains de ses codes visuels, puis les tordre pour raconter une histoire nouvelle.
Pour les fans de récits post apocalyptiques, Illusion céleste est donc bien plus qu’un simple « meilleur anime de 2023 ». C’est une œuvre charnière, à la croisée des influences, qui prouve qu’un manga, un anime et un jeu vidéo peuvent se répondre et se nourrir mutuellement, tout en continuant à surprendre et à émouvoir.